Shout for life

Point de vue

La mer

Esplanade de la Défense, Paris, 2011. Header of this blog, from it’s creation until January 2013.

Two months before I took that picture, someone talked to me there, at that very place where I later took the picture.

That was June 21st, Fête de la musique.
A moment before he came to me, I’d heard him sing with a rock band.

Among thousands of individuals in a colony, penguins identify their partner by the sound of their singing.

I thought I had recognized him.

In his voice was a shout for life.
The very same kind of shout I had in my voice: a muzzled shout.
From that moment, I knew we could mutually free ourselves of that muzzling. So I thought the two of us had to be. Forever.

No matter how much I hated La Defense. I always felt it was a hugely unhuman place. Giant towers there feel so much like the gigantic constructions ancient totalitarian system built at human costs – from egyptian pyramids to stalinian palaces. Their inner asceptical athmosphere and their outer oppressing size are so symbolic of how financial capitalism is squeezing life as well as human subjectivity.

When I went back to that place, I liked it though. Not just because he lived nearby and had showed me those cats that seem to come out of nowhere, after all the stressed out penguins in business suit, finally get on their two hours trip back to their suburbian house.

It felt like I was born there. I liked it, as you like the place where you are born. No matter how ugly or crazy the place is, you are attached to it. You can sometimes hate it. But you are still attached to it in some way. All you can choose is : attached in what way.

A year later, when I started this blog, I realized that maybe, I actually liked the place because something blossomed there. In what started there. In saying his name, in the soft caress of his arms. Something blossomed in my voice.

When we were sitting there chating, the water in front of us and the noise of some wonky air con blower as a wind ersatz got both of us to think of seaside. That was far from enough for me to call that place la mer.

And I wanted him with me on the road away from la mère, out of the Sagrada Familia wall. I wanted him so much. Probably because I thought I could not make that journey by myself.

It turned out that all he wanted was someone on his coach when he gets back from work or when he watches football games. No matter how much I loved him, at some point I had to face the facts : this is not me.

That’s how I learned that the road away from la mère, out of the sagrada familia wall is each of us own way.

Still. I fooled myself into believing he would come with me the whole way.
It took me a while to accept that no mater how much I loved him, I could only let him go his own way.
And take my own steps.

Poser ma voie.

Now that he holds someone else in his arms, that thing in my voice, that other myself that was born there grew stronger.

Poser ma voix.

That voice is rooted in the moments of tenderness with him. In that stretch of road we walked together, away from la mère.

I will take care of that seed.
Water it with more love
and let it grow.

To keep that voice blowing.

Pour un art poétique

Citation

pour un art poétique - Raymond Queneau Prenez un mot prenez en deux faites les cuir' comme des oeufs prenez un petit bout de sens puis un grand morceau d'innocence faites chauffer à petit feu au petit feu de la technique versez la sauce énigmatique saupoudrez de quelques étoiles poivrez et mettez les voiles Où voulez vous donc en venir ? A écrire Vraiment ? A écrire ?
Raymond Queneau
in Le chien à la mandoline

Initialement publié en illustration – désabusée ? – d’un cours sur l’analyse automatique de données textuelles, dispensé de 2000 à 2002, dans le cadre d’un DESS d’Ingénérie du Retour d’Expérience

zone de turbulences

Citation

zone de turbulences
les démons hantent
le chaos vente
pas de sens

parler est un naufrage social
qui peut entendre ces histoires ?
se taire est un effondrement intérieur
comment sortir de ces non-histoires ?

il fait tellement froid dans ces abîmes
et il n’y a pas de choix
il faut y aller seule

est-ce que je serai encore en vie
le jour où ce sera fini ?

je
dis
oui

Les soi(e)s du symbolique

Point de vue

Suspendus au dessus du gouffre du réel – chaos de chairs, de tensions, d’odeurs, de sensations – les fils qui nous empêchent d’y sombrer sont dits symboliques. Ce sont les fils des histoires que l’on raconte. Celles que l’on entend et celles que l’on se raconte*. Les histoires que racontent les parents et les cultures, les fils des liens sociaux et de la langue, bref, les liens qui font les identités et le sens.

Relations qui se nouent et se dénouent, passages de la vie (adolescence, vieillesse), changement de statut social (mariage, diplôme), lectures et expériences nouvelles d’où émergent de nouvelles façon de les tisser, comme des soies d’araignées, certains de ces liens sont rompus et reconstruits en permanence. Les sujets humains tissent continuellement les discours qui à la fois, les constituent et les soutiennent*.

Vivant dans le symbolique comme des poissons dans l’eau, nous finissons par oublier son existence. La plupart des gens sont comme Monsieur Jourdain qui faisait de la prose sans le savoir: ils traversent la vie sans prendre conscience de ce qu’est le symbolique. Ils vivent au centre du cocon, constamment baignés de discours et d’images qui à la fois expliquent et cachent le monde réel, tout en l’ordonnant d’une manière qui relève à la fois du collectif et de l’individuel.

Etre passé par des états qui font prendre conscience du réel, et de ce que sont l’imaginaire et le symbolique est une chance exceptionnelle de savoir ce qu’est la liberté. Liberté de lâcher certains liens et d’en nouer d’autres. Mais cette chance a un prix. De ceux qui se paient cash, c’est-à-dire en peurs et en souffrances brutes, à même la chair. Parce que le corps ne fait pas crédit.
Cette chance de liberté peut donc se payer pas content. Le risque est alors de vouloir oublier cette liberté, de vouloir retourner se blottir dans les bras illusoires d’un Autre, dont on aimerait croire encore qu’Il nous protège vraiment du monde, de ses changements, de ses déplaisirs. Les religions, certains militantismes et certains responsables politiques ne se privent pas de nous pousser sur cette pente…

Un jour, il faut pourtant se rendre à l’évidence: je est seul.

je est seul dans son désir.

Ou plutôt, les je sont seuls.

Reliés par les soi(e)s du symbolique.

C’est déjà un peu moins effrayant, mais quand même, il faut s’y faire !

*Cette formulation est directement inspirée d’un texte de Bertrand Leclair, qui devait originairement constituer l’épilogue de son roman La main du scribe et qui a été lu par l’auteur, lors de la journée « Amour II » à La Ralentie:

C’est que le sujet parlant, l’animal doué de parole qui dit « je » a une histoire lui, une histoire particulière conditionnée par l’histoire collective et inscrite dans sa trame et il s’y accroche pour continuer de dire « je » au milieu des autres qui savent dire « je » aussi bien que lui et parfois tellement mieux. Le sujet qui dit « je » est une fiction. Un fiction qu’il construit dans le même temps qu’il l’agit, une fiction prise dans la fiction générale, tissée fil à fil, fils à fils avec et dans la matière, la matière humaine, la matière d’avant l’histoire, d’avant les mots qui disent les histoires. Le sujet se gorge d’histoire, les siennes et celles des autres. Il en écoute, il s’en raconte, il les raconte et se met ainsi en scène au théâtre des autres au prix d’un paradoxe, cela même qui le saisi tout entier, le rend à lui-même insaisissable. Il se raconte des histoires pour continuer d’exister dans la comédie sociale. ?L’appliquer? comme on préserve l’espace d’un rôle, pour ne pas voir que ce sont les histoires, les siennes et celles des autres qui le racontent et non pas l’inverse. Ne pas voir que ce sont les histoires racontées qui tissent la fiction cousue de fil blanc dans laquelle il n’a bientôt plus conscience de se protéger douloureusement des changements d’états de la matière. Le mouvement même de la vie, ce mouvement qui toujours déchire les histoires lorsqu’il advient malgré tout.